Envie de sucre à partir de 17h ?

Si comme beaucoup de personnes, vous êtes capable de manger raisonnablement le matin et le midi mais que tout dérape à partir de 17 heures, ce qui suit pourrait bien vous intéresser.
Pourquoi n'êtes-vous capable de tenir vos bonnes résolutions alimentaires ?
Schématiquement, il y a deux choses qui induisent les compulsions alimentaires.
La première, c'est la restriction.
Cela peut vous paraitre surprenant, mais si vous ne mangez pas assez, votre corps a des carences, et arrive un moment où il va réclamer de la nourriture pour y pallier. Et là, le plus souvent, il prend les commandes, et vous ne maitrisez plus rien. Si vous ne mangez quasiment rien le matin et le midi dans une optique de régime et perte de poids, il ne faut pas vous étonner que votre corps, affamé, vous rappelle à l'ordre arrivé en fin d'après-midi.
La seconde, ce sont les émotions.
Qui n'a jamais mangé parce qu'il s'ennuyait ou parce qu'il était en colère, ou au contraire joyeux et qu'il y avait quelque chose à fêter ? La fin d'après-midi avec son lot d'énervement, de fatigue, de frustration, et la transition que constitue le retour à la maison est un moment réellement propice à l'expression des émotions. Vous êtes fatigué mais la journée n'est pas finie pour autant. Il faut encore s'occuper des enfants, des devoirs, de la maison, de la préparation du repas et j'en passe. Tout ceci peut constituer un afflux d'émotions en tous genres que vous allez compenser dans le réfrigérateur ou le placard.
Mais ce n'est pas tout.
Si les compulsions arrivent le plus souvent en fin d'après-midi, cela est dû également à notre horloge biologique. Explications :
La sérotonine vous jouerait-elle des tours ?
La sérotonine est un neurotransmetteur, c'est à dire une substance chimique fabriquée par votre organisme, qui permet à vos neurones de transmettre un message. C'est l'hormone de la sérénité. Elle permet d'actionner le frein des pulsions vers le sucré, le tabac, l'alcool... Si vous avez des pulsions, il y a fort à parier que la sérotonine y soit pour quelque chose.
Origine de la sérotonine
La sérotonine est synthétisée dans votre organisme à partir d'un acide aminé appelé tryptophane.
Pour rappel, un acide aminé est une molécule que l'on trouve dans les protéines. Il existe 20 acides aminés différents. Certains sont dits essentiels, c'est à dire que le corps doit les trouver dans des apports extérieurs et d'autres ne le sont pas, car le corps sait les fabriquer à partir des premiers. Le tryptophane dont nous parlons ici est dit essentiel, ce qui signifie que seule l'alimentation peut l'apporter à votre corps.
On le trouve principalement dans les protéines d'origine animale (viande, oeuf, poisson), dans le lait, et dans les oléagineux (noix de cajou, amandes, cacahuètes).
Si tout se passe bien, le tryptophane ingéré devient 5HTP puis sérotonine et enfin mélatonine, l'hormone du sommeil.
Conversion du tryptophane en sérotonine - Une course d'obstacle
Retenez que seule la sérotonine qui est dans votre cerveau va avoir une influence sur vos pulsions. Les molécules doivent donc passer du tube digestif dans le sang puis dans le cerveau pour être actives. Malheureusement, de nombreux obstacles peuvent s'interposer sur le chemin du tryptophane avant qu'il ne devienne sérotonine.
Premier obstacle : la dysbiose intestinale
Le tryptophane contenu dans les aliments ingérés commence son périple dans votre organisme en passant par l'intestin.
Si vous souffrez d'un déséquilibre de la flore intestinale (dysbiose), assorti d'une constipation chronique, une partie du tryptophane disponible va être dégradé par la flore de putréfaction et aboutir à la synthèse d'indican, une molécule non assimilable. Une partie du tryptophane est donc en quelque sorte perdue pour l'objectif qui nous préoccupe ici. L'indicanurie est d'ailleurs un test qui indique la présence d'indican dans l'urine, révélant ainsi les cas de perturbation de l'équilibre bactérien intestinal avec excès de putréfaction ou de fermentation.
Deuxième obstacle : les autres acides aminés Le tryptophane restant va devoir utiliser des transporteurs pour passer la muqueuse intestinale et se retrouver dans le sang. Or, les transporteurs du tryptophane ont aussi une forte affinité pour d'autres acides aminés. En présence de ces autres acides aminés, la compétition peut être rude, et très peu de tryptophane va être capté par les entérocytes (cellules de la muqueuse intestinale) pour aller dans le sang. Il peut être utile de limiter par des évictions alimentaires les aliments contenant ces autres acides aminés lors de l'apport d'aliments riches en tryptophane pour éviter ce phénomène de compétition.
Troisième obstacle : le foie
Le tryptophane, qui a réussi à être capté au niveau des entérocytes, arrive dans le sang où il circule lié à l'albumine. Arrivé au foie, il peut alors être capté par celui-ci pour synthétiser de la vitamine B3 si l'organisme en manque. Cette vitamine est impliquée dans les mécanismes de détoxication de l'organisme. Ainsi, si votre foie est intoxiqué, par la prise de médicaments, par la pilule contraceptive ou par d'autres substances, le processus de détoxication sera sur-sollicité, et le besoin en vitamine B3 accru ce qui conduira là encore à un détournement du tryptophane.
Quatrième obstacle : l'inflammation
Si vous souffrez d'inflammation chronique du fait d'un régime alimentaire inapproprié, d'une hygiène de vie médiocre ou de maladie, les tissus de votre organisme vont également capter ce tryptophane pour le transformer en molécules anti-inflammatoire, diminuant encore le taux de tryptophane plasmatique restant.
Cinquième obstacle : l'albumine
Seul le tryptophane libre, c'est à dire celui qui s'est détaché de l'albumine va pouvoir pénétrer dans le cerveau.
Cette libération du tryptophane de l'albumine peut se faire :
· en présence d'acide acétylsalicylique salicylique (aussi dénommé aspirine),
· en présence de lithium,
· en présence d'acides gras libérés par le sport. En effet, les acides gras, tout comme le tryptophane, circulent liés à l'albumine. Lorsque vous faites du sport, vous augmentez la libération d'acides gras qui vont mobiliser l'albumine pour circuler, laissant plus de tryptophane libre.
Inversement, le cortisol, qui est augmenté chez les personnes déprimées et stressées, diminue les concentrations de tryptophane libre dans le plasma.
Sixième obstacle : la barrière hématoencéphalique
Arrivé au niveau du cerveau, le tryptophane libre va devoir passer la barrière hématoencéphalique. C'est elle qui a pour mission de protéger notre cerveau de ce qui est nuisible pour lui. Là encore, il est en compétition avec d'autres acides aminés (phénylalanine, tyrosine, leucine, isoleucine, valine). Compétition qui malheureusement tourne souvent en sa défaveur, ce qui explique qu'il n'en reste que très peu.
Par contre, l'insuline induite par la consommation de produits sucrés abaisse la concentration des acides aminés qui sont en compétition avec notre précieux tryptophane, en les détournant vers les cellules musculaires. Consommer du sucre, facilite donc l'entrée du tryptophane dans le cerveau. C'est pourquoi en cas de déficit en sérotonine, votre cerveau cherchant à tout prix à obtenir du tryptophane va émettre le message : il me faut du sucre.
Septième obstacle : les cofacteurs
Tous les mécanismes évoqués ici font appel à des enzymes qui n'agissent qui si elles ont les cofacteurs appropriés. Sont particulièrement impliqués ici : les vitamines B et D, le magnésium, le fer et le zinc. Un niveau optimal en vitamines et en oligo-élément constitue donc également un paramètre indispensable à la synthèse de sérotonine.
Alors pourquoi en fin de journée ?
Notre organisme est naturellement calé sur un rythme de 24 heures, induit par la luminosité. Comme indiqué plus haut, la sérotonine est le précurseur de la mélatonine, l'hormone du sommeil. C'est donc en fin de journée, aux environs de 17 heures que notre cerveau, se préparant à la production de mélatonine a besoin de sérotonine. Si le tryptophane n'a pas réussi à franchir tous les obstacles évoqués précédemment et n'est pas parvenu en quantité suffisante dans le cerveau, il va y avoir un déficit en sérotonine.
Comme je l'ai déjà mentionné,
· la sérotonine est le frein qui vous permet de maitriser vos pulsions. Si vous en manquez, les pulsions trouvent à s'exprimer et vous ne saurez pas les réfréner.
· consommer du sucre permet d'éliminer les compétiteurs du tryptophane pour que celui-ci pénètre dans le cerveau et que la sérotonine puisse être produite en quantité accrue.
La sérotonine ainsi produite en urgence, joue son rôle d'hormone de la sérénité, ce qui vous explique pourquoi vous vous sentez mieux après la consommation de produits sucrés.
En conclusion
Si vous souhaitez lutter contre les fringales de fin d'après-midi votre volonté n'y suffira pas. Une prise en charge plus globale est nécessaire. Il vous faudra :
· Veiller à avoir des apports de tryptophane en quantité suffisante en particulier lors du repas du matin car il va falloir plusieurs heures à cet acide aminé pour qu'il arrive à votre cerveau.
· Veiller à avoir une flore intestinale de qualité.
· Veiller à ne pas apporter trop d'acides aminés entrant en compétition avec le tryptophane lorsque vous consommez des aliments en contenant.
· Procéder régulièrement à une détoxication hépatique.
· Prendre en charge l'inflammation chronique.
· Faire du sport.
· Lutter contre le stress et soigner sa déprime. Vous l'avez compris, plus vous êtes déprimé ou stressé, plus vous chercherez du réconfort dans les produits sucrés.
· Optimiser votre statut en vitamines et oligo-éléments.
Remarque : Ne vous avisez pas à prendre du tryptophane en complément alimentaire sans l'avis d'un spécialiste. Celui-ci est majoritairement transformé en sérotonine dans le tube digestif. Or, cette sérotonine qui passe du tube digestif dans le sang ne sait pas passer la barrière hématoencéphalique qui a pour mission de protéger le cerveau. Elle n'est donc d'aucune utilité, sans parler du fait qu'elle sera captée par les plaquettes sanguines jouant alors un rôle de vasoconstricteur qui augmente les risques de migraines et d’accidents thrombo-emboliques (phlébites, embolies, accidents vasculaires cérébraux).
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